18h00, fin de journée pour moi, et oui je suis en poste depuis 8h du mat’. J’ai dû ouvrir et fermer la barrière des centaines de fois. Les « Bonjour » et « Bonne journée », je ne les compte même pas. Derrière mon masque, moi je souris, ce qui n’est pas vraiment le cas des gens que je croise : des patients, des médecins, des ambulanciers, des visiteurs, des gens pressés, d’autres perdus, énervés ou totalement perchés. « Bonjour madame, vous venez pourquoi ? Votre passe sanitaire s’il vous plaît ! Je vais vous demander de bien vouloir ouvrir votre coffre s’il vous plaît ! C’est bon tout est parfait. Bonne journée à vous ».
Je le connais par cœur ce foutu discours, mon discours, celui que je répète à longueur de journée. Il n’y a pas vraiment de temps mort ici. La barrière doit être crevée, je me demande bien comment elle fait pour tenir toute la journée, et la nuit aussi, car il n’y a pas vraiment de répit par ici. Une ambulance s’amène, gyrophares et tout le tintouin. Pas vraiment le temps de discuter, j’actionne l’ouverture de la barrière et la voilà qui file. Ah les urgences… Pas de chance, aujourd’hui c’est jour de pluie. Ah, qu’est-ce que je les maudis ces jours gris. La flotte tombe à grand bruit sur mon cabanon et je me prends une douche à chaque contrôle de coffre. Sans compter sur l’humidité : c’est moite et ça sent mauvais.
Faut dire que la guérite n’est pas totalement étanche. Mais bon, faut pas s’en plaindre, on a un toit au-dessus de la tête, c’est mieux que d’être en plein vent toute la journée hein ! Ah ça y est j’aperçois Jean-Philippe au loin. Jean-Phi c’est mon collègue, celui qui me relève pour la nuit. Un vrai bosseur ce type, un gars bien, ça c’est clair. Une poignée de main et une accolade, ça me réchauffe par ce froid glacial. Comme à notre habitude on boit le café ensemble. Un café serré pour nous réchauffer, pour discuter. 18h30 fin de service : j’enlève ma casquette de garde-barrière pour retrouver celle d’époux et de père de famille.
A.